lundi 27 février 2017

"Autrui est le médiateur indispensable entre moi et moi-même : j’ai honte de moi tel que j’apparais à autrui"

Commentaire

L'Être et le néant (1943) est, comme l'indique son sous-titre, un Essai d'ontologie phénoménologique. S'inscrivant dans la lignée de la phénoménologie husserlienne, Sartre part de l'idée que toute conscience est toujours conscience de quelque chose. Mais il remarque aussi que cette conscience est, en même temps, conscience de ce qu'elle n'est pas, conscience de son néant. L'homme se trouve donc placé face à lui-même et son mode d'être est radicalement différent de celui des choses qui l'entourent : alors que leur essence résume ce qu'elles sont, chez l'homme, l'existence précède l'essence. Autrement dit, l'homme doit composer avec une liberté fondamentale qui ne lui dicte rien. Exister, c'est avoir à être, c'est devoir se construire librement et indépendamment de toute nécessité.

Le texte ci-dessous est extrait de la troisième partie des quatre parties que compte l'ouvrage et qui est intitulée "Le pour autrui". Le chemin de pensée est le suivant : tout d'abord, Sartre part de la conscience qu'il relie au problème du néant (toute conscience est conscience de quelque chose et conscience de n'être pas cette chose). Sartre poursuit son analyse et en arrive au pour soi qui est la manière d'être de l'existant humain : manque d'être, il est incapable de coïncider avec lui-même, c'est là le fondement ontologique de la conscience. Enfin, il aboutit au pour autrui : c'est autrui qui permet à la conscience de revenir à soi. L'exemple de la honte sert justement à montrer qu'autrui est le seul moyen pour la conscience de devenir conscience de soi.

lundi 6 février 2017

"L'autre est aussi une conscience de soi"

Commentaire

La Phénoménologie de l'Esprit (1807) est une oeuvre de Georg Wilhelm Friedrich Hegel (1770-1831) qui cherche à retracer les processus à l'oeuvre dans la conscience. L'évolution de la constitution de cette conscience est dialectique au sens hégélien du terme, c'est-à-dire qu'elle suit un processus qui se confond avec l'essence même de la conscience.

Le texte ci-dessous est extrait de la quatrième partie consacrée à la vérité de la certitude de soi-même. Hegel dans les parties I à III s'est concentré sur la conscience simple. Dans la partie IV, il aborde la manière dont cette conscience devient conscience de soi, c'est-à-dire connaissance de soi-même. Cette conscience de soi ne peut intervenir qu'à travers la reconnaissance d'une autre conscience. Autrement dit, ce n'est que dans et par la relation avec une autre conscience qu'une conscience de soi est possible. L'enjeu du texte est donc de rendre compte d'un point de vue logique de ce qu'il se passe dans la conscience lorsque celle-ci en rencontre une autre.

mercredi 1 février 2017

"Le respect s'applique toujours uniquement aux personnes, jamais aux choses"

Commentaire

La Critique de la raison pratique (1788) est un ouvrage d'Emmanuel Kant (1724-1804) qui vise à expliquer ce qui détermine un individu à agir moralement. Sachant que l'agir pour être moral doit être chez Kant complètement désintéressé, qu'est-ce qui va pousser un individu à agir comme tel ? Le terme clé est celui de liberté. Elle est définie par Kant comme autonomie, c'est-à-dire comme capacité pour un sujet à se donner à lui-même sa propre loi et donc, à agir pour des mobiles internes et non externes à lui. Comme exemple de mobiles externes, nous pouvons citer le bonheur ou le plaisir. Que va donc être ce mobile interne, principe subjectif qui va déterminer la volonté à agir moralement ?

La notion de respect introduite par Kant cherche à répondre à cette question. Le mobile moral ne peut pas être sensible, sinon il serait extérieur au sujet, ce qui le rendrait hétéronome (il tiendrait sa loi d'autre chose que lui-même). Il ne peut pas non plus être purement intelligible, car l'homme étant un être doté de sensibilité, ce mobile serait inefficace, de l'ordre seulement de l'idée. Il faut donc supposer l'existence d'un sentiment déterminé a priori. L'"Analytique de la raison pratique" (I, 1) et, plus précisément, son chapitre III portant sur les mobiles dont est extrait le texte ci-dessous révèle que le respect est un sentiment qui élève en même temps qu'il humilie devant la loi.