Le Discours de la méthode s’ouvre sur cette phrase célèbre : « le bon sens est la chose du monde la mieux partagée ». Cette affirmation inaugurale semble flatter le lecteur en reconnaissant que tout homme est doué de raison, c'est-à-dire du pouvoir égal de juger. Elle est iconoclaste (briseuse d’images) car elle ne fait pas reposer l’intelligence sur le nombre d’années d’étude (contrairement à la scholastique, cette philosophie développée et enseignée dans les universités au Moyen Âge visant à concilier l'apport de la philosophie grecque avec la théologie chrétienne), mais sur la capacité de chacun à exercer son jugement.
Mais la flatterie ne dure qu’un temps : « ce n’est pas assez d’avoir l’esprit bon, mais le principal est de l’appliquer bien » précise Descartes. Cela signifie qu’il ne suffit pas d’avoir du bon sens pour atteindre la vérité. L’exercice de la raison ne suffit pas. Encore faut-il savoir bien user de sa raison, c'est-à-dire de se servir d’une méthode. Le fait d’être doué de raison est une condition nécessaire, mais pas suffisante, pour bien juger. Il faut en outre une méthode adéquate qui garantisse la véracité de ses jugements.
Le Discours de la méthode se présente ainsi comme un récit du cheminement de Descartes pour parvenir à bien juger, c'est-à-dire à s’assurer du vrai. Les règles qu’il propose dans la deuxième partie du discours sont inspirées de ses découvertes mathématiques (notamment en géométrie analytique avec le fameux repère cartésien). Elles servent à guider notre raison. Pour se prémunir de l'erreur, il faudra donc s’assurer de partir d’idées parfaitement claires et distinctes.
Chez Descartes, les critères de l’évidence sont la clarté et la distinction. C’est pourquoi l’idée vraie est toujours claire et distincte. Descartes définit dans Les Principes de la philosophie (I, 45) la clarté comme « ce qui est présent et manifeste à un esprit attentif » et la distinction comme « ce qui est tellement précis et différent de toutes les autres [idées], qu’elle ne comprend en soi que ce qui paraît manifestement à celui qui la considère comme il faut ».
Par exemple, une idée est claire quand elle n’est pas trop compliquée, c'est-à-dire quand on ne peut pas se la présenter mentalement sans aucun problème : l’idée d’un carré ou d’un triangle. En revanche, on ne peut pas avoir une idée claire de ce qu’est une figure à 1000 côtés (un chiliogone). Il faudra donc pour le connaître le démembrer pour partir du plus simple (le diviser en figures simples).
Quant à l’idée distincte, c’est celle qui n’est pas confuse : l’idée d’un triangle en tant que figure à trois côtés ne se confond pas avec l’idée du carré (une figure à quatre côtés). Autrement dit, même si l’évidence est la conclusion d’une démarche critique, elle doit apparaître à l’esprit « d’un seul coup » ; elle procède donc d’une véritable intuition intellectuelle. Elle est ce qui se révèle indubitablement et immédiatement vrai (c'est-à-dire dans qu’il soit besoin de la démontrer) à un esprit attentif.
Comme l’écrit Spinoza dans L’Ethique (1677), une idée vraie est comparable à la lumière, c'est-à-dire qu’elle est à la fois ce qui éclaire (elle est son propre critère de vérité) et ce qui permet de dépouiller les objets de leur obscurité (elle est le critère du faux) : « comme la lumière se fait connaître elle-même et fait connaître les ténèbres, la vérité est norme d’elle-même et du faux ». Par le biais de cette analogie de la lumière et de la vérité, Descartes tenait la première règle de sa méthode, son premier critère pour juger du vrai : ne recevoir aucune chose pour vraie tant que son esprit ne l'aura clairement et distinctement assimilé préalablement.
c'est trop cool votre publication.
RépondreSupprimergénial mais nous voulnns plus de défiitions
RépondreSupprimerC'est intéressante
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