Introduction
L'existence et le temps sont deux notions qui entretiennent un rapport de sens. L'existence désigne le fait d'être et le temps correspond au milieu dans lequel l'existence se déroule. Ce temps de l'existence est marqué par un début, la naissance, et une fin, la mort. L'existence se confond ainsi avec la vie elle-même. Elle interroge par voie de conséquence notre relation à la mort, qui peut être une source légitime d'inquiétudes et d'angoisses, voire engendrer de véritable crises "existentielles", c'est-à-dire une remise en cause de ce qu'on croyait être le sens de l'existence.
Mais le temps peut aussi être appréhendé comme une notion indépendante de l'existence humaine. Il est alors ce temps divisé en heures, minutes, secondes, un temps chronométré et objectif qui règle nos vies (heure du lever, du coucher). Son écoulement est irréversible, les voyages dans le passé ou dans le futur, outre les difficultés logiques qu'ils posent (qu'advient-il du présent si l'on change le passé ?) semblent possibles seulement dans les films ou les romans. Le temps présente aussi une dimension insaisissable, le présent n'étant finalement jamais fixe, davantage à imaginer comme un écoulement permanent, nous n'aurions le choix que de vivre dans l'avenir ou dans le passé.
Ce caractère insaisissable du temps invite à se demander s'il existe un temps en dehors de la conscience humaine. Le temps pour être éternel comme Dieu n'a semble-t-il pas la même dimension que pour nous qui sommes des êtres mortels. En outre, il nous arrive fréquemment de perdre la notion du temps, par exemple, lorsque nous lisons un livre de philosophie passionnant. Le temps passe ainsi plus ou moins vite selon que nous sommes intéressés ou non par un sujet. D'où la nécessité de mener son existence au caractère fini d'une certaine manière, nous montrant plus soucieux du présent que d'un hypothétique avenir ou d'un passé dont le poids nous éviterait de vivre dans l'instant. Quels sont les différents modes de relations possibles de la conscience à l'existence et au temps ?
1/ La mort n'est rien
Dans sa Lettre à Ménécée, Epicure (341-270 av. J.-C.) expose les fondements de sa morale que l'on peut condenser en quatre formules et qui forment ensemble ce qu'on appelle le tetrapharmakos ou "quadruple remède" : les dieux ne sont pas à craindre, la mort n'est rien, le bonheur est possible, la douleur est aisée à supporter. Le deuxième remède vise donc à lutter contre la crainte de la mort. Epicure montre comment il est possible de s'en débarrasser par un exercice de pensée qui suit une méthode rationnelle. Il s'appuie sur une doctrine physique matérialiste selon laquelle l'âme est corporelle et composée d'atomes. Par conséquent, l'âme ne survit pas après la mort du corps mais disparaît avec lui.
Cette deuxième proposition morale d'Epicure s'apparente à un conseil, voire à un exercice qu'il donne à ses disciples : "accoutume-toi à considérer que la mort n'est rien pour nous". Le sage épicurien s'est en effet habitué à désamorcer sa peur de la mort par une mécanique rationnelle implacable. Qu'est-ce que la mort ? Elle est "privation de sensation". Le mort ne sent plus rien, ni le bien, ni le mal. Par conséquent, la mort ne fait ni jouir ni souffrir. Elle n'est donc pas à craindre. C'est ici le premier argument d'Epicure pour se convaincre que la mort n'est rien : les morts ne sont plus, ils ne souffrent pas de leur mort.
Epicure poursuit sa réflexion et affirme paradoxalement que la connaissance du caractère mortel de la vie constitue une source de satisfaction. Elle permet, en effet, de se débarrasser du regret de ne pas être immortel. La mort est souvent perçue par les vivants comme "le plus effroyables des maux". Or une fois qu'on a compris que la mort faisait partie de la vie et qu'elle n'était pas à craindre puisque non douloureuse, on se débarrasse aussi de l'angoisse de mourir. En conséquence, la perspective de la mort n'a plus rien d'effrayant pour celui qui a fait l'effort de réfléchir à ce qu'elle est : "quand nous sommes, la mort n'est pas présente ; [...] quand la mort est présente, alors nous ne sommes pas". Le deuxième argument est donc que les vivants sont en vie et donc qu'ils ne souffrent pas de la mort s'ils examinent rationnellement ce qu'elle est : la simple cessation de la vie.
Il existe deux attitudes possibles face à la mort : celle qui consiste à la fuir comme le plus grand des maux et celle qui consiste à la percevoir comme une délivrance des maux de la vie. Le sage épicurien rejette ces deux attitudes. On pense ici à la position socratique défendue par Platon dans le Phédon, dialogue où il avance la thèse d'une immortalité de l'âme. Socrate explique que les vrais philosophes sont en fait déjà morts, parce qu'étant habitués à réfléchir, à prendre de la distance, à détacher leur âme de leur corps, ils dédaignent les plaisirs vulgaires tels que les beaux habits ou les belles chaussures et privilégient les jouissances intellectuelles. Le philosophe platonicien se rapproche de l'éternité des idées et fustige le commun des mortels qui s'adonne aux plaisirs des sens sans se soucier de son âme.
Epicure renvoie dos à dos ces deux attitudes : finalement, la mort inquiète le sage platonicien comme le vulgaire, le premier parce qu'il s'empresse de mourir pour se libérer des nécessités du corps, le second parce qu'il fuit la mort dans l'assouvissement aveugle de ses désirs. Or, si l'on examine rationnellement ce qu'est la mort, on constate qu'elle n'est "rien" et que ce "rien", à entendre comme absence de sensation (et non comme "néant" qui est une notion moderne), ne peut en aucun cas devenir un sujet de préoccupation ou de crainte. Par conséquent, la bonne attitude à l'égard de la vie consiste, comme pour la nourriture, à privilégier la qualité plutôt que la quantité : mieux vaut une vie courte mais agréable, qu'une vie éternelle dépouillée de ses agréments ; mieux vaut un plat fin et délicieux, qu'un amas de mets fades et sans intérêt gustatif.
Contre Platon qui oppose la vie et la mort, Epicure affirme l'unité de ces deux pôles : "c'est par un seul et même soin que l'on parvient à bien vivre et à bien mourir". Il est impossible de bien vivre si l'on angoisse en permanence à la perspective de la mort, tout comme il est stupide de ne pas profiter "des satisfactions que la vie procure". Il est donc inutile d'enjoindre au jeune homme de bien vivre ou au vieillard de bien mourir, comme si l'un devait en profiter et l'autre, au contraire, se restreindre. Quelque soit l'âge, tout est affaire de limites : le jeune disciple et le vieux sage épicuriens doivent s'habituer à distinguer parmi les plaisirs ceux qui sont naturels et nécessaires, des autres plaisirs naturels et non nécessaires et surtout, éliminer les plaisirs qui sont à la fois non naturels et non nécessaires car ils sont une source de préoccupations inutiles. Il s'agit ici d'instaurer une mesure des plaisirs à tous les âges de la vie.
2/ L'énigme du temps
Les Confessions (397-401) sont une oeuvre à vocation autobiographique écrite par Augustin d'Hippone, plus connu sous le nom de Saint Augustin (354-430). Le livre XI est consacré au rapport du temps et de la création divine. Augustin établit que Dieu a créé le temps et qu'il n'existe donc pas de temps avant lui, Dieu étant extérieur du temps. Dans le chapitre XIV de ce même livre intitulé "Qu'est-ce que le temps ?", il montre que la question de la nature du temps demeure énigmatique.
En effet, Augustin relève le paradoxe suivant : le temps est ce qu'il y a de plus connu, de plus familier et pourtant, si l'on doit en donner une définition, traduire la pensée que l'on a du temps en paroles, cela semble extrêmement difficile, voire impossible. L'enjeu est de donner une définition du temps qui soit capable de rendre compte de l'expérience du temps. Le problème est qu'une définition délimite, donne un cadre, marque un arrêt alors que le temps constitue une succession ininterrompue et perpétuelle de moments présents qui deviennent quasi instantanément des moments passés.
En effet, Augustin relève le paradoxe suivant : le temps est ce qu'il y a de plus connu, de plus familier et pourtant, si l'on doit en donner une définition, traduire la pensée que l'on a du temps en paroles, cela semble extrêmement difficile, voire impossible. L'enjeu est de donner une définition du temps qui soit capable de rendre compte de l'expérience du temps. Le problème est qu'une définition délimite, donne un cadre, marque un arrêt alors que le temps constitue une succession ininterrompue et perpétuelle de moments présents qui deviennent quasi instantanément des moments passés.
Augustin résume sa perplexité ainsi : "Qu'est-ce donc que le temps ? Si personne ne m'interroge, je le sais ; si je veux répondre [...], je l'ignore". Tout le monde fait l'expérience du temps et, en ce sens, le temps est tout ce qui est de plus connu et de plus familier. Lorsque nous en parlons, nous parvenons à nous comprendre, comme si le mot permettait de faire signe vers l'intuition que nous en avons tous. Pour autant, nous demeurons incapables d'en offrir une définition. Ce n'est donc pas l'expérience du temps qui pose problème, mais sa traduction en mots, sa saisie abstraite et conceptuelle. Augustin cherche donc à expliquer pourquoi le temps échappe ainsi à la raison.
Pour sa démonstration, il recourt aux trois dimensions du temps que sont le passé, le futur et le présent. Ces trois temps existent d'une certaine manière, mais comment dire ce qu'ils sont vraiment ? Le passé ne peut pas être sur le même mode que l'être des choses, puisque justement, sa caractéristique première consiste à n'être plus. Symétriquement, l'avenir est ce qui, logiquement, n'est pas encore puisqu'il n'est pas advenu. Autrement dit, parler d'être du passé ou d'être du futur semble davantage tenir du paradoxe logique que du raisonnement sensé. Le passé et le futur ne sont pas, et pourtant ils existent dans notre appréhension du temps.
La troisième dimension du temps est le présent. Augustin remarque qu'il se distingue de l'éternité en ce qu'il devient passé sitôt advenu. En ce sens, l'éternité serait un temps toujours au présent. Mais il s'agit là d'une impossibilité pour Augustin qui oppose justement le temps à l'éternité. L'éternité est le privilège de Dieu. La créature vit dans le temps, créé par Dieu. Or ce temps de la créature, ce temps humain, est marqué essentiellement par un manque d'être : le présent vole sans cesse au passé, le passé n'est plus et l'avenir pas encore. Le temps dans lequel nous vivons est donc un temps qui n'est jamais fixé, qui tend soit au passé, soit à l'avenir, et qui n'est présent que de manière fugitive.
Le temps de Saint Augustin se rapproche de notre compréhension chrétienne et moderne du temps au sens où il est linéaire (passé, présent, futur), ce qui n'était pas le cas chez Platon ou Aristote où le temps était conçu comme cyclique (en lien avec le mouvement des astres dans l'univers). Par ailleurs, Augustin inscrit le temps dans la subjectivité humaine, ce que fait également un philosophe comme Bergson avec la notion de durée qui renvoie au temps vécu, insaisissable conceptuellement, davantage de l'ordre de l'intuition, et qu'il oppose au temps de la science, quadrillé, mesuré, divisé en heures, minutes et secondes.
Le temps de Saint Augustin se rapproche de notre compréhension chrétienne et moderne du temps au sens où il est linéaire (passé, présent, futur), ce qui n'était pas le cas chez Platon ou Aristote où le temps était conçu comme cyclique (en lien avec le mouvement des astres dans l'univers). Par ailleurs, Augustin inscrit le temps dans la subjectivité humaine, ce que fait également un philosophe comme Bergson avec la notion de durée qui renvoie au temps vécu, insaisissable conceptuellement, davantage de l'ordre de l'intuition, et qu'il oppose au temps de la science, quadrillé, mesuré, divisé en heures, minutes et secondes.
3/ L'impossible présent
Le fragment 43 (édition Le Guern) des Pensées (1670) traite de la manière dont l'homme vit dans le temps. Selon Blaise Pascal (1623-1662), l'homme tend à oublier le moment qu'il vit au profit des moments dont il se rappelle ou de ceux qu'il entrevoit. Préoccupé du passé ou du futur, il ne coïncide jamais avec le moment présent. Cette absence de coïncidence est à mettre en relation avec la notion de divertissement mais aussi avec celle de vanité qui conduit l'homme à prétendre à davantage que ce qu'il possède, souvent pour son propre malheur.
A la manière d'un Horace pessimiste, lequel dans son Ode I, 11 à Leuconoé intimait de cueillir le jour ("carpe diem"), Pascal regrette notre incapacité à profiter du présent : "nous ne nous tenons jamais au présent". Le verbe "nous ne nous tenons" est ici à comprendre en deux sens : d'une part, nous ne parvenons pas à nous en tenir seulement au présent, à nous contenter du présent, et d'autre part, nous ne nous tenons jamais vraiment dans le présent, puisque nous ne parvenons jamais à en faire une fin de notre comportement.
En effet, dans son expérience du temps, la conscience se tient toujours selon Pascal entre deux extrémités : soit elle regarde impatiemment vers l'avenir, soit elle se tourne nostalgiquement vers le passé. Autrement dit, l'expérience du temps que fait la conscience ne colle jamais au présent, mais se détourne, se divertit au sens étymologique du latin divertere (se détourner). Pascal qualifie ce comportement d'imprudent et de vain. Il est imprudent puisque dans les deux cas, la conscience se perd. Le seul temps qu'elle possède est celui du présent. Et il est vain, dans la mesure où ce sont des moments qui n'existent plus ou pas, ce qui nous détourne du seul temps qui subsiste, à savoir le présent lui-même.
La raison qui explique cette fuite en arrière ou en avant est que "le présent d'ordinaire nous blesse". Se tenir au présent est une source d'affections pénibles : ou bien nous sommes mal et nous nous détournons de lui, ou bien nous sommes bien et alors nous avons peur qu'il s'évanouisse. Cette peur d'un bonheur évanescent nous conduit à des calculs : nous soutenons le présent par l'avenir, c'est-à-dire que, même dans un moment présent agréable, notre pensée est préoccupée par l'idée de préserver pour l'avenir ce moment, ce qui nous empêche d'en profiter pleinement. Or remarque Pascal, nous remettons ainsi les choses "pour un temps où n'avons aucune assurance d'arriver". En d'autres termes, nous faisons semblant de ne pas voir notre condition mortelle.
Pascal invite à l'introspection pour que chacun puisse se rendre compte par lui-même de la véracité de ce qu'il avance : "que chacun examine ses pensées, il les trouvera toutes occupées au passé ou à l'avenir". La conscience se trouve en permanence en avant ou en arrière d'elle-même. Et lorsque nous pensons au présent, en réalité, nous n'y pensons que pour mieux disposer de l'avenir. Il y a là une dimension qui tient à la vanité humaine, la vanitas (au sens latin du terme) désignant le vide d'un être dont les ambitions apparaissent comme si démesurées qu'elles en deviennent risibles. Croire que nous pourrons disposer à volonté de l'avenir, c'est être vaniteux car nous n'avons aucune garantie de vivre jusque là.
Ainsi conclut Pascal, "le présent n'est jamais notre fin". Notre unique et véritable fin est l'avenir, les autres temps ne sont que des moyens pour y parvenir. L'homme se détourne du présent et est obnubilé par le bonheur prochain. Dans ces conditions, Pascal estime le bonheur impossible : "nous ne vivons jamais, mais nous espérons de vivre, et nous disposant toujours à être heureux, il est inévitable que nous ne le soyons jamais". De la même manière que nous ne parvenons jamais à nous tenir au présent, nous ne parvenons jamais au bonheur, dont la condition serait une coïncidence avec le présent. La nature de la conscience qui est de se rapporter au passé ou au futur fait que l'homme se trouve condamné à ne jamais coïncider avec le moment présent. En se préparant incessamment au bonheur, croyant faire son bien, il augmente en réalité sa propre misère.
La conscience pascalienne est une conscience malheureuse : l'homme est incapable de jouir du moment présent parce qu'irrémédiablement tourné vers l'avenir ou préoccupé du passé. Sur ce thème de la conscience malheureuse, Pascal rejoint Montaigne (Essais I, 3, "Nos affections s'emportent au-delà de nous") qui écrit : "nous ne sommes jamais chez nous, nous sommes toujours au delà. La crainte, le désir, l'espérance, nous élancent vers l'avenir et nous dérobent le sentiment et la considération de ce qui est, pour nous amuser à ce qui sera, voire quand nous ne serons plus". Le sage pour Montaigne approfondit le présent pour en jouir davantage, il se tient au présent pour goûter le bon temps dans sa plénitude. Pour Pascal, ce bonheur semble en revanche une impossibilité tant qu'il est recherché.
4/ L'éternel retour
Le Gai Savoir (1882) est une oeuvre de Friedrich Nietzsche (1844-1900) composée initialement de quatre livres auxquels Nietzsche a ajouté une Préface et un cinquième livre à l'occasion d'une seconde édition en 1887. Dans le paragraphe 340 (livre IV), Nietzsche revient sur les dernières paroles de Socrate avant sa mort : "Oh, Criton, je dois un coq à Asclépios" (le dieu de la médecine dans la mythologie grecque). Nietzsche interprète ces mots comme l'aveu d'une conception de la vie qu'il condamne et qui consisterait à la voir comme une maladie. Nietzsche appelle ainsi de ses voeux un dépassement non seulement du christianisme, mais des Grecs eux-mêmes au sens où Socrate, ayant pourtant vécu gaiement se serait contenter de faire bonne figure.
La doctrine de l'éternel retour se veut une façon de réaliser ce dépassement et d'aimer la vie pour ce qu'elle est, sans crainte ni ressentiment. Elle est exposée dans le paragraphe qui suit : le paragraphe 341 (IV). Nietzsche propose à son lecteur une expérience terrifiante : "Cette vie, telle que tu la vis et l'a vécue, il te faudra la vivre encore une fois et encore d'innombrables fois". Il s'agit donc d'imaginer qu'il soit possible de revivre sa vie, exactement la même vie, indéfiniment. L'enjeu n'est pas de se donner à chaque fois une nouvelle chance de changer le cours de son existence, mais de revivre "chaque douleur et chaque plaisir et chaque pensée et soupir" sans "rien de nouveau", selon "la même succession et le même enchaînement", jusqu'à "cette araignée et ce clair de lune entre les arbres, et également cet instant" et y compris ce questionnement. La répétition de la vie se fait donc à l'identique, sans aucune variation.
La doctrine de l'éternel retour se veut une façon de réaliser ce dépassement et d'aimer la vie pour ce qu'elle est, sans crainte ni ressentiment. Elle est exposée dans le paragraphe qui suit : le paragraphe 341 (IV). Nietzsche propose à son lecteur une expérience terrifiante : "Cette vie, telle que tu la vis et l'a vécue, il te faudra la vivre encore une fois et encore d'innombrables fois". Il s'agit donc d'imaginer qu'il soit possible de revivre sa vie, exactement la même vie, indéfiniment. L'enjeu n'est pas de se donner à chaque fois une nouvelle chance de changer le cours de son existence, mais de revivre "chaque douleur et chaque plaisir et chaque pensée et soupir" sans "rien de nouveau", selon "la même succession et le même enchaînement", jusqu'à "cette araignée et ce clair de lune entre les arbres, et également cet instant" et y compris ce questionnement. La répétition de la vie se fait donc à l'identique, sans aucune variation.
Le titre du paragraphe exprime alors ce que serait une telle croyance : "le poids le plus lourd". Un homme se sachant condamné à devoir revivre la même vie éternellement ressentirait à chaque instant de sa vie comme un poids qui pèserait sur la façon dont il mènerait sa vie. Les conséquences d'une action seraient à assumer non pas seulement une vie entière mais pour l'éternité. La doctrine de l'éternel retour fonctionne donc comme un test permettant de déterminer quelle est la bonne décision à prendre : ce serait celle que nous serions prêts à assumer un nombre incalculable de fois. Cette épreuve apparaît en décalage avec les croyances classiques, marquées par l'influence du christianisme, qui posent la question de la moralité de l'action par rapport à une transcendance, c'est-à-dire dans une perspective où un autre monde est possible après la mort. La vie est posée par Nietzsche comme immanente : il n'y a rien en dehors d'elle.
Quelle serait alors la réaction d'un homme face à une telle doctrine ? Nietzsche imagine deux possibilités : le désespoir d'une part, l'enthousiasme d'autre part. En effet, un lecteur qui ne supporterait pas l'idée d'avoir un tel poids sur les épaules se retrouverait terrifié. Paralysé, il maudirait le démon. En revanche, elle pourrait avoir un impact positif pour un lecteur qui verrait là une occasion d'intensifier son amour de la vie. Or, c'est bien l'effet que Nietzsche souhaite créer avec sa doctrine. Un lecteur enjoué ferait du démon un dieu et se trouverait comme métamorphosé. Cette métamorphose le conduirait à vivre d'autant plus intensément sa vie et à s'en éprendre davantage : "combien te faudrait-il aimer et toi-même et la vie pour ne plus aspirer à rien d'autre qu'à donner cette approbation et apposer ce sceau ultime et éternel ?"
Cette doctrine nietzschéenne de l'éternel retour engage ainsi à refuser de suivre une doctrine morale qui nierait la vie comme valeur. Elle sert ainsi de "sceau ultime et éternel" à chaque instant incitant l'homme à aimer la vie pour ce qu'elle est et non en vue ou d'après des arrières-mondes comme ceux que l'on trouve dans les religions ou dans certaines philosophies (la doctrine des formes de Platon). Pour Nietzsche, il faut parvenir à la volonté de revivre ce qui a déjà été vécu. Cela implique le rejet des morales ascétiques qui invitent justement à se détourner de la vie d'ici bas. Mais cela ne signifie pas non plus qu'il faille rester dans un amour béat de la vie. La vie doit être acceptée telle qu'elle est, avec ses bonheurs mais aussi ses malheurs. L'erreur de Socrate soulignée dans le paragraphe 340 est de vouloir se venger de la vie à cause des souffrances qu'elle contient. Pour Nietzsche, ces souffrances doivent au contraire être acceptées avec optimisme, sans ressentiment à l'égard de la vie.
5/ La durée
Dans l'Essai sur les données immédiates de la conscience (1889), Henri Bergson (1859-1941) met en garde contre la tendance de l'esprit à penser le temps dans l'espace. Dans le chapitre II intitulé "De la multiplicité des états de conscience : l'idée de durée", Bergson critique la conception de l'école anglaise qui consiste à rabattre tous les rapports d'étendue à des rapports de succession dans la durée. C'est pourquoi il distingue deux types de durée : la durée où intervient la notion d'espace, comprise comme succession et la durée qu'il juge "toute pure", c'est-à-dire indépendante de la notion d'espace, comprise donc comme simultanéité.
Pour Bergson, il importe de comprendre précisément à quoi renvoie la notion de durée : "la durée toute pure est la forme que prend la succession de nos états de conscience quand notre moi se laisse vivre". La durée est une forme de succession d'états de conscience, c'est-à-dire qu'elle se rapporte à un temps vécu de manière subjective. Mais ce temps n'est pas un temps réflexif, il est celui d'une conscience qui s'abandonne au rythme de la vie. Bergson précise que le moi se laisse vivre précisément lorsqu'il "s'abstient d'établir une séparation entre l'état présent et les états antérieurs". Autrement dit, ce n'est pas une conscience qui se rapporte à un présent relativement à un passé, mais un temps tel qu'il s'écoule pour une conscience, un temps où le passé est solidaire du présent, justement parce que c'est un temps qui dure.
Dans l'expérience de la durée, il ne s'agit pas de coïncider avec le moment présent, de se concentrer spécifiquement sur une sensation ou sur une idée, car alors il n'y aurait plus de durée. Il ne s'agit pas non plus de se couper des états antérieurs de telle manière à les oublier. Pour ressentir la pure durée, il faut et il suffit de ne pas avoir du temps une appréhension spatiale. Les états de conscience ne doivent pas se retrouver juxtaposés telle une série de points dans l'espace, comme s'ils venaient les uns après les autres, appréhension que l'on a du temps lorsqu'on observe une frise chronologique par exemple. La durée n'est pas le temps en ce qu'elle s'épure de tout espace, en ce qu'elle ne se déploie que comme du temps qui se prolonge, où les moments s'interpénètrent entre eux, solidairement.
Pour se faire comprendre Bergson recourt à une image musicale. Dans la mélodie, les notes se succèdent mais "nous les apercevons néanmoins les unes dans les autres". Ces notes forment ensemble "un être vivant", c'est-à-dire que les parties de la mélodie, à la manière des organes, sont à la fois distinctes et solidaires, elles s'interpénètrent. Cela signifie que les moments qui composent la durée se rattachent de manière organique les uns aux autres. Bergson prouve cette idée en montrant qu'en insistant sur une note, on ne modifie pas simplement la mesure du temps, mais on modifie aussi la mélodie dans son ensemble. Les notes sont à la mélodie ce que les organes sont au corps, et les moments composant la durée ne sont pas du temps en série, mais bien des éléments organiques d'un ensemble vécu.
Bergson conclut que la durée constitue "la succession sans la distinction". L'esprit, par sa capacité d'abstraction, dispose du moyen de détailler chaque moment du temps vécu pour l'examiner. Il réalise alors une mise en espace du temps. Mais il ne s'agit pas de l'expérience première du temps qui se fait dans la durée. Or, cette durée est un sentiment diffus, parfois obscur, d'éléments qui se confondent, s'interpénètrent, sont solidaires entre eux. Elle est, en quelque sorte, le tissu de la conscience, c'est-à-dire ce dont elle est faite avant même le travail de mise en espace réalisé par la conscience réflexive. Il précise que cette présentation du temps est valable pour un être "qui n'aurait aucune idée de l'espace". L'espace introduit dans l'expérience de la durée l'idée d'une division, d'une distinction, ainsi qu'on marque les temps en musique ou qu'on définit les époques en histoire.
Dans l'expérience de la durée, il ne s'agit pas de coïncider avec le moment présent, de se concentrer spécifiquement sur une sensation ou sur une idée, car alors il n'y aurait plus de durée. Il ne s'agit pas non plus de se couper des états antérieurs de telle manière à les oublier. Pour ressentir la pure durée, il faut et il suffit de ne pas avoir du temps une appréhension spatiale. Les états de conscience ne doivent pas se retrouver juxtaposés telle une série de points dans l'espace, comme s'ils venaient les uns après les autres, appréhension que l'on a du temps lorsqu'on observe une frise chronologique par exemple. La durée n'est pas le temps en ce qu'elle s'épure de tout espace, en ce qu'elle ne se déploie que comme du temps qui se prolonge, où les moments s'interpénètrent entre eux, solidairement.
Pour se faire comprendre Bergson recourt à une image musicale. Dans la mélodie, les notes se succèdent mais "nous les apercevons néanmoins les unes dans les autres". Ces notes forment ensemble "un être vivant", c'est-à-dire que les parties de la mélodie, à la manière des organes, sont à la fois distinctes et solidaires, elles s'interpénètrent. Cela signifie que les moments qui composent la durée se rattachent de manière organique les uns aux autres. Bergson prouve cette idée en montrant qu'en insistant sur une note, on ne modifie pas simplement la mesure du temps, mais on modifie aussi la mélodie dans son ensemble. Les notes sont à la mélodie ce que les organes sont au corps, et les moments composant la durée ne sont pas du temps en série, mais bien des éléments organiques d'un ensemble vécu.
Bergson conclut que la durée constitue "la succession sans la distinction". L'esprit, par sa capacité d'abstraction, dispose du moyen de détailler chaque moment du temps vécu pour l'examiner. Il réalise alors une mise en espace du temps. Mais il ne s'agit pas de l'expérience première du temps qui se fait dans la durée. Or, cette durée est un sentiment diffus, parfois obscur, d'éléments qui se confondent, s'interpénètrent, sont solidaires entre eux. Elle est, en quelque sorte, le tissu de la conscience, c'est-à-dire ce dont elle est faite avant même le travail de mise en espace réalisé par la conscience réflexive. Il précise que cette présentation du temps est valable pour un être "qui n'aurait aucune idée de l'espace". L'espace introduit dans l'expérience de la durée l'idée d'une division, d'une distinction, ainsi qu'on marque les temps en musique ou qu'on définit les époques en histoire.
6/ La contingence de l'existence
Dans La Nausée (1938), Jean-Paul Sartre (1905-1980) raconte l'histoire d'un professeur de province de trente-cinq ans, Antoine Roquentin, qui vit seul à Bouville, cité imaginaire ressemblant au Havre où Sartre avait enseigné au début de sa carrière. Il travaille à l'écriture d'une thèse ayant pour sujet un certain marquis de Rollebon. En ramassant un galet au bord de la plage, Roquentin s'aperçoit que sa perception des objets a changé et il commence à tenir un journal, écrit à la première personne, constituant le texte du roman, afin de comprendre l'origine de ce changement.
Si la nausée est communément définie comme une envie de vomir, elle renvoie étymologiquement à la sensation de malaise que ressent le marin sur un bateau qui tangue (nausea en latin désigne le "mal de mer" et le "navire" en grec se dit naus). Elle exprime également un sentiment de dégoût que l'on peut éprouver à l'égard de soi-même et des autres. Ces différentes acceptions se retrouvent dans l'expérience de la Nausée réalisée par le jeune doctorant. Elle désigne plus spécifiquement chez Sartre la compréhension par l'homme du caractère contingent de chaque chose : tout ce qui existe aurait pu ne pas être. En saisissant que rien n'est nécessaire, y compris son existence propre, le héros est pris d'une forme d'écoeurement face à une existence que plus rien ne justifie.
Cette expérience de la Nausée s'ouvre sur la vision d'une racine de marronnier. Le fait qu'il s'agisse de la racine d'un arbre n'est pas anodin. La racine du marronnier est en quelque sorte le symbole de la racine de l'être. La philosophie chez Descartes est comparée à un arbre dont les racines sont la métaphysique, le tronc la physique et les branches l'ensemble des autres sciences (cf. la "Lettre Préface" aux Principes de la philosophie). Cette racine de marronnier est décrite comme "une masse noire et noueuse, entièrement brute". Elle comporte une dimension inquiétante puisqu'elle fait "peur" au héros. Elle semble en effet ne plus correspondre à son concept qui permet de bien la distinguer des choses : "les mots s'étaient évanouis et, avec eux, la signification des choses". Les choses perdent leur nom, leur définition et donc leurs limites.
Cette dissolution du monde extérieur a comme pendant l'émergence de la conscience d'exister du héros : "jamais, avant ces derniers jours, je n'avais pressenti ce que voulait dire "exister"". L'étymologie latine d'exister (ex-sistere) suggère qu'il se place (sistere) maintenant hors de lui-même (ex). En effet, il explique que jusqu'à présent, il était comme les autres, à savoir ceux qui confondent l'être et l'existence : "je disais comme eux "la mer est verte" ; ce point blanc là-haut est une mouette". Mais identifier et nommer les choses, dire ceci est cela, ce n'est pas sentir qu'elles existent. Paradoxalement, l'existence est omniprésente, on en parle tout le temps, mais sans la sentir, sans avoir le sentiment de la "mouette-existante". Cela s'explique par le fait que "l'existence se cache".
Avant d'avoir cette prise de conscience de ce qu'est l'existence, Roquentin affirme en être resté à la surface des choses. Ces choses avaient une utilité, se rattachaient à des catégories d'objets, mais elles apparaissaient comme "un décor". L'existence de ces choses n'était pas tenue pour problématique : "si l'on m'avait demandé ce qu'était l'existence, j'aurais répondu de bonne foi que ça n'était rien", "une forme vide" qui ne modifie pas leur nature. Mais l'expérience de l'existence agit comme un dévoilement : derrière le "vernis" qui recouvre les choses, qui n'est autre que notre langage, notre manière d'individualiser par des mots les objets du monde extérieur, se dissimule leur caractère d'existant. Ce sont "des masses monstrueuses et molles, en désordre - nues, d'une effrayante et obscène nudité". Les choses comportent ainsi une indétermination première, un caractère informe, une nudité primordiale qui est choquante.
L'existence apparaît comme "la pâte même des choses". Elle échappe aux catégories du langage et de l'utilité parce qu'elle les précède. Elle s'expérimente dans "une extase horrible" : le grec ekstatis désignant "l'action consistant à être hors de soi", l'extase étant ici une propédeutique au sentir exister. Sur le moment, Roquentin ne parvient pas à exprimer ce qu'il ressent. Il se sent nauséeux, mais c'est après seulement qu'il comprend ce qui se trame dans la Nausée. Ressentir la Nausée cela signifie saisir que "l'essentiel c'est la contingence", c'est-à-dire que "par définition, l'existence n'est pas la nécessité". L'être véritable des choses - leur existence - consiste en la contingence, en "la gratuité parfaite". Il n'y a aucune nécessité pour que les choses soient ce qu'elles sont quand on les désigne ou qu'on les utilise avec des mots. Ainsi, les êtres humains comme les choses, "tout est gratuit". Et, conclut Sartre : "Quand il arrive qu'on s'en rende compte, ça vous tourne le coeur et tout se met à flotter". Cette conscience de la contingence de l'existence commence avec les symptômes de la naupathie.
Cette dissolution du monde extérieur a comme pendant l'émergence de la conscience d'exister du héros : "jamais, avant ces derniers jours, je n'avais pressenti ce que voulait dire "exister"". L'étymologie latine d'exister (ex-sistere) suggère qu'il se place (sistere) maintenant hors de lui-même (ex). En effet, il explique que jusqu'à présent, il était comme les autres, à savoir ceux qui confondent l'être et l'existence : "je disais comme eux "la mer est verte" ; ce point blanc là-haut est une mouette". Mais identifier et nommer les choses, dire ceci est cela, ce n'est pas sentir qu'elles existent. Paradoxalement, l'existence est omniprésente, on en parle tout le temps, mais sans la sentir, sans avoir le sentiment de la "mouette-existante". Cela s'explique par le fait que "l'existence se cache".
Avant d'avoir cette prise de conscience de ce qu'est l'existence, Roquentin affirme en être resté à la surface des choses. Ces choses avaient une utilité, se rattachaient à des catégories d'objets, mais elles apparaissaient comme "un décor". L'existence de ces choses n'était pas tenue pour problématique : "si l'on m'avait demandé ce qu'était l'existence, j'aurais répondu de bonne foi que ça n'était rien", "une forme vide" qui ne modifie pas leur nature. Mais l'expérience de l'existence agit comme un dévoilement : derrière le "vernis" qui recouvre les choses, qui n'est autre que notre langage, notre manière d'individualiser par des mots les objets du monde extérieur, se dissimule leur caractère d'existant. Ce sont "des masses monstrueuses et molles, en désordre - nues, d'une effrayante et obscène nudité". Les choses comportent ainsi une indétermination première, un caractère informe, une nudité primordiale qui est choquante.
L'existence apparaît comme "la pâte même des choses". Elle échappe aux catégories du langage et de l'utilité parce qu'elle les précède. Elle s'expérimente dans "une extase horrible" : le grec ekstatis désignant "l'action consistant à être hors de soi", l'extase étant ici une propédeutique au sentir exister. Sur le moment, Roquentin ne parvient pas à exprimer ce qu'il ressent. Il se sent nauséeux, mais c'est après seulement qu'il comprend ce qui se trame dans la Nausée. Ressentir la Nausée cela signifie saisir que "l'essentiel c'est la contingence", c'est-à-dire que "par définition, l'existence n'est pas la nécessité". L'être véritable des choses - leur existence - consiste en la contingence, en "la gratuité parfaite". Il n'y a aucune nécessité pour que les choses soient ce qu'elles sont quand on les désigne ou qu'on les utilise avec des mots. Ainsi, les êtres humains comme les choses, "tout est gratuit". Et, conclut Sartre : "Quand il arrive qu'on s'en rende compte, ça vous tourne le coeur et tout se met à flotter". Cette conscience de la contingence de l'existence commence avec les symptômes de la naupathie.
Conclusion
La deuxième maxime d'Epicure, composante du quadruple remède, consiste à se répéter que la mort n'est rien. Les deux arguments sont les suivants : on ne souffre pas de la mort quand on est mort et on n'en souffre pas non plus quand on est vivant si l'on garde à l'esprit qu'elle n'est que la simple cessation de la vie. Ainsi, la mort n'étant rien, il ne faut pas s'en préoccuper.
Saint Augustin souligne la dimension énigmatique du temps qui semble une notion évidente à tous et qui pourtant ne se laisse pas aisément définir. Il montre que cette difficulté est liée au manque d'être du temps, qui, une fois passé, n'est plus et qui, dans l'avenir, n'est pas encore. Quant au présent, celui-ci ne dure pas contrairement à l'éternité qui est le privilège de Dieu.
Pascal montre notre incapacité à nous tenir au présent, complètement obnubilés que nous sommes soit par notre avenir, soit par notre passé. Cette incapacité a pour conséquence de nous rendre le bonheur impossible, ou que nous souhaitions l'être ou bien que nous tentions de le rester. Nous sommes victimes de notre vanité : rien ne garantit que nous ayons un avenir.
La doctrine de l'éternel retour vise à un renversement des valeurs que Nietzsche appelle de ses voeux. Face aux morales ascétiques qui condamnent la vie en vue d'une hypothétique récompense dans l'au-delà, il affirme la nécessité d'accepter la vie telle qu'elle est, ici et maintenant, avec son lot de souffrances et de malheurs.
Bergson invite à faire la différence entre deux appréhension du temps : le temps mathématique et le temps subjectif. Si le premier se révèle utile parce qu'il offre une appréhension objective du temps, il conduit cependant à se représenter le temps comme une succession de points. Au contraire, la durée est un temps subjectif, à comprendre comme un ensemble organiquement et solidairement lié.
Enfin, à travers l'expérience de l'existence, qui consiste à se placer hors des choses afin de les voir dans leur nudité essentielle, dépouillée des oripeaux du langage, elles apparaissent dans leur essentielle contingence, parfaitement gratuite, sans le secours de l'être qui pourrait justifier telle ou telle forme, telle ou telle définition. L'existence pour Sartre commence avec la Nausée.
Limpide, synthétique, rejet de tout jargon. Excellent
RépondreSupprimer